Mise au point d’un système de signalisation des incidents causés par des pesticides

Planifier les activités de suivi, promouvoir la collecte de données et signaler les graves incidents de santé causés par des PPED, aux niveaux national et international.

Certains pays ont des difficultés à trouver des ressources suffisantes pour mettre en place un système national de signalisation des incidents. Toutefois, plusieurs communautés et organisations ont entrepris des enquêtes sanitaires à petite échelle et des systèmes de surveillance communautaires. Ces systèmes “d’autosurveillance” peuvent être un point de départ pour les pays qui disposent de moyens limités, ou un complément utile pour les systèmes de signalisation des incidents déjà existants.

Ici vous trouverez des éléments applicables à deux types d’approches de la mise en place d’un système de signalisation des incidents d’intoxication : conduite d’une enquête pour recueillir des informations et mise en place d’un système communautaire de surveillance sanitaire.

Chacune de ces options a ses avantages et ses inconvénients et un grand nombre des étapes décrites sont communes aux deux approches. Une enquête a l’avantage d’être une opération axée sur le court terme, alors qu’un système communautaire de surveillance sanitaire a plus d’effets à long terme et une durabilité plus grande. Le choix de la méthode dépend des objectifs immédiats que l’on vise ainsi que des ressources disponibles.

Les informations collectées dans les rapports sur les incidents d’intoxication par les pesticides ont l’avantage de pouvoir être utilisées pour prévenir des incidents futurs.

Les figures 2 et 3 proposent deux feuilles de route récapitulant les principales étapes des méthodes d’enquête et de surveillance communautaire, permettant de collecter des données sur les intoxications par les pesticides que les AND pourront utiliser durant la phase de planification.

Objectif

Un système de signalisation des incidents a pour objectif d’identifier les incidents liés à l'exposition aux pesticides ayant des effets aigus sur la santé humaine. Le système peut être conçu pour identifier les groupes à haut risque ou pour mieux comprendre les risques que courent les groupes vulnérables, c’est-à-dire les enfants, les femmes enceintes et les ouvriers agricoles sans terre. Les résultats doivent être utilisés pour alerter les autorités sanitaires et environnementales sur les risques que présentent les pesticides pour la santé humaine dans certaines conditions d’utilisation et informer les autorités compétentes en matière de réglementation des pesticides de l’éventuelle nécessité de prendre des mesures pour atténuer ces risques.

Avantages

Les systèmes communautaires de surveillance ont le gros avantage de permettre aux participants de mieux prendre conscience du fardeau des maladies découlant de l’abus ou de l’usage incorrect des pesticides. Ils peuvent donc fournir une excellente base pour des activités de prévention.

Les enquêtes visant à obtenir des informations spécifiques sur les incidents d’empoisonnement par les pesticides ont l’avantage de se dérouler sur une brève période et de donner une idée générale immédiate de la situation sur le terrain.

L’Autorité Nationale Désignée (AND) peut utiliser les données sur les incidents pour soumettre, au titre de l’Article 6 de la Convention de Rotterdam, une proposition d’inscription de préparations pesticides qui causent des problèmes dans les conditions où elles sont utilisées dans un pays.

Ressources humaines et financières

Des acteurs clés devront être identifiés pour mettre au point et mener à bien le programme de suivi et de signalisation. Ces acteurs pourraient comprendre les AND, des participants issus d’autres ministères, comme ceux de la santé, de l’environnement et de l’agriculture, des associations d’agriculteurs, des médecins, des centres de santé, des centres anti-poisons, des ONG, etc.

Il importe que les acteurs clés prennent le temps de discuter des résultats attendus et des informations à recueillir. Chaque étape doit être planifiée en concertation entre tous les acteurs.

Il faudra en particulier identifier le personnel de terrain et organiser les aspects logistiques pour mener à bien les activités de suivi et de signalisation.

Les acteurs clés doivent aussi discuter des sources de financement et du coût des activités et les déterminer avant d’aborder chaque phase de planification.

Identification du groupe et de la zone cibles

Qui participera au système de surveillance sanitaire? Il est important de définir les critères de sélection des participants, qui pourraient comprendre : l’âge, le sexe, le lieu, la profession (ex : travailleur employé dans une plantation, ou cultivateur de légumes), la fréquence d’utilisation des pesticides, etc. Un groupe cible (ou un site) peuvent être choisis pour différentes raisons: des problèmes peuvent avoir été signalés dans un lieu particulier, au sein d’un groupe spécifique ou avec un pesticide déterminé. Il se peut encore que la quantité de pesticides utilisée par un certain groupe suscite des préoccupations.

Des raisons pragmatiques, telles que l’accès et le transport, peuvent aussi influencer le choix du lieu. L’échelle du système de suivi et le nombre de participants dépendront aussi des ressources disponibles. Il faut aussi se demander si l’enquête portera uniquement sur les cultivateurs ou si on interrogera aussi les membres de leurs familles, les travailleurs agricoles et d’autres personnes à risque.

Identification d’autres sources d’information

Le système de signalisation des incidents peut se limiter à collecter des données auprès du groupe cible, ou avoir une portée plus large. Des renseignements précieux peuvent être obtenus auprès d’autres sources que le groupe cible, tels que médecins traitants, certificats de décès, centres anti-poison, services de vulgarisation en matière de protection des végétaux, services de santé publique/lutte contre les vecteurs, ministères du travail ou syndicats (pour la morbidité et la mortalité liés au travail), etc.

Identification ou mise au point des instruments de collecte des données

Les informations collectées doivent être en rapport avec les objectifs de l’activité et certaines peuvent porter sur l'identité et les caractéristiques du pesticide, le scénario d’exposition et les symptômes de la personne touchée. Le CD contient plusieurs exemples d’activités de suivi et de formulaires de rapport qui peuvent être utilisés tels quels ou adaptés, s’il y a lieu, aux conditions locales.

On doit avoir présent à l’esprit l’utilisation qui sera faite des données collectées lorsque l’on conçoit un formulaire national et prendre en considération les circonstances d’une exposition et d’autres facteurs qui ont une incidence, tels que le niveau d’instruction des personnes interrogées. Les informations sur l’emploi de pesticides dans l’intention de commettre un suicide doivent être distinguées clairement des incidents liés à une exposition accidentelle ou professionnelle.

En principe, les instruments de collecte de données doivent être testés et améliorés avant la mise en route des activités de suivi, dans la mesure où les ressources et les circonstances le permettent.

La Partie B du formulaire de rapport mis au point par la Convention de Rotterdam est un bon outil pour réunir des informations sur les accidents de santé. Elle peut être adaptée et modifiée selon les besoins.

D’autres types de renseignements peuvent être recueillis, notamment:

Sur le pesticide:

  • l’étiquette du pesticide incriminé
  • la formulation du pesticide, notamment:
    • nom et nom commercial de la préparation
    • matière active
    • concentration
    • type de préparation (ex. liquide soluble, concentré émulsifiable, etc.)

Sur les conditions d’utilisation:

  • durée de l’exposition (ex. 3 heures par jour pendant 5 jours)
  • méthode d’application (ex: pulvérisateur à dos, applicateur à mèche, etc.)
  • conditions générales (ex. saison, heure de la journée, conditions météorologiques, etc.)
  • accès de l’applicateur à l’équipement de protection
  • capacité de l’applicateur à lire et à comprendre l’étiquette

Sur l’incident:

  • temps écoulé entre l’application du pesticide et l’apparition des symptômes
  • lieu de l’incident
  • nombre de personnes exposées
  • activité au moment de l’exposition
  • utilisation d’équipement de protection

Sur les symptômes:

  • effets néfastes
  • traitement médical et hospitalisation

Les Autorités Nationales Désignées sont invitées à communiquer au Secrétariat de la Convention de Rotterdam les incidents graves qui leur ont été signalés, au moyen du formulaire de rapport sur les accidents de santé humaine établi par la Convention.

Le caractère confidentiel des données et informations personnelles qui permettraient d’identifier les personnes interrogées doit être respecté, mais davantage d’informations d’ordre plus général pourraient être rendues publiques.

Communication des données à la Convention de Rotterdam

La transmission de rapports sur les incidents causés par les pesticides à la Convention de Rotterdam offre une possibilité de les faire connaître au monde entier, au moyen de la Circulaire PIC qui est publiée deux fois par an. Elle permet aussi à d’autres pays d’être informés sur certaines préparations pesticides qui ont des effets nocifs dans d’autres pays et de prendre des mesures pour réduire les risques s’il y a lieu. Il sera ainsi plus facile d’éviter de nouveaux cas d’intoxication.

Enfin, grâce aux rapports soumis à la Convention de Rotterdam, la préparation pesticide pourrait être soumise à la procédure PIC, qui permet de fournir des informations supplémentaires à d’autres pays sur la préparation afin qu’ils puissent prendre des décisions sur son importation, et interdire son entrée sur leur territoire s’il est établi qu’elle ne peut pas être gérée sans danger.